Monsieur *,
Je prends mon clavier aujourd'hui pour réagir à vos propos de lundi dernier.
J'avoue ne pas vous avoir écouté sur le moment, craintive que j'étais de ressembler à madame Groseille dans La vie est un long fleuve tranquille (simple image -je ne me suis jamais surprise à cracher sur un poste télévisé -!?!). Mais faute d'oreilles en direct, je me suis servie de mes yeux pour lire quelques articles concernant votre allocution, et hier, je me suis enfin motivée à vous écouter tout en continuant ma lecture...
Ma première réaction fut l'incrédulité : la vaccination n'est toujours pas obligatoire, mais les restrictions sont telles qu'elles poussent les gens à aller se faire vacciner. Incrédulité dans vos mots (vous m'avez montré qu'ils fusaient facilement de votre bouche, et que bien souvent nous n'étions pas d'accord -ce qui en soit n'est pas un vrai problème : nous sommes en démocratie et vous avez été élu, là où j'ai fait le choix de ne pas voter) mais aussi dans la réaction des Français. Là où j'aurais imaginé un soulèvement, je lis qu'il y eut quelques 17000 prises de rendez-vous par minute suite à votre intervention télévisée. Là où je vois incohérences et mise au pas (comme si les Français étaient des petits enfants), et où j'imagine les gens réagissant chez eux (puis dans la rue si nécessaire -moi qui ne suis pourtant pas révolutionnaire), je vois quelques Français suivant la volonté étatique. Je reconnais néanmoins que quelques soient les motivations (crainte d'une vie sociale "bancale" -doux euphémisme, crainte de transmettre cette maladie à un proche fragile -même si vos propos ne portaient guère sur ce point, ou toutes autres raisons), il est encore question de choix, et je ne vais pas jeter la pierre sur une personne décidant de se faire vacciner.
Non, c'est contre vous, monsieur, que je fustige. Contre vous, car non seulement votre cheminement de pensée(s) me paraît chaque jour plus incohérent (il suffit de se pencher sur les réseaux sociaux pour assister à un "joli" pot-pourri de propos irrationnels, voire contradictoires), mais en plus je me sens pointée du doigt (en fermant les yeux, j'imaginerais presque le choc des petits cailloux jetés sur moi).
S'il est indispensable de se faire vacciner, pourquoi ne pas rendre le vaccin obligatoire ? Pourquoi en arriver à la menace de la privation de libertés (et l'exécution de cette dernière -car, sans réellement m'y connaître en politique et lois, j'imagine que ce que vous souhaitez faire passer, passera) ?
Ensuite, comme je l'écrivais ci-dessus : je me sens pointée du doigt. Je ne suis pas une "antivaccin" : je n'imagine ni nanoparticules, ni complot ou que sais-je encore. Je fais le choix de ne pas me faire vacciner et de ne pas faire vacciner mes enfants simplement parce que nous ne sommes pas des personnes risquant de développer une forme grave de la maladie, que le risque que je prends ne concerne que moi (les personnes à risque ayant généralement fait le choix de se faire vacciner) et que le vaccin n'est tout simplement pas obligatoire (comme un fait récurrent ?-!).
Je tiendrai le temps que je le pourrai. Si je lis des explications claires sur la nécessité d'atteindre x% de vaccinés pour faire reculer le virus (et non pour soulager les hôpitaux -je suis consciente de la surcharge de travail du corps hospitalier, mais votre gestion -et certainement celle de vos prédécesseurs- à minima des services publiques, dont ceux de la santé, me parait bien maigre ; et je ne mettrai pas mon corps et encore moins celui de mes enfants en contrepoids de vos choix budgétaire et économique), je me ferais vacciner ; si mon choix prive mes enfants de sorties à la bibliothèque (un exemple parmi d'autres), je nous ferais vacciner... Mais j'aurais alors dans le coin de ma tête cette très désagréable impression de ne pas faire de choix, de ne plus être libre...
Un dernier mot (veuillez m'excuser pour les propos de néophyte et désordonnés que je peux tenir, ils sont grandement dus à un dysfonctionnement médical -qui, en octobre, valait dans d'autres pays des tests pour savoir s'il n'était pas lié à la Covid-19...) pour vous écrire que votre façon de monter les gens les uns contre les autres ("reconnaitre le civisme et faire porter les restrictions sur les non vaccinés plutôt que sur tous") provoque chez moi une aversion en votre endroit. Et il est simplement honteux (pour vous, monsieur) et horrible (pour les personnes qui décident d'avoir encore le choix) de subir une quelconque discrimination...
Alors non, je n'ai pas craché sur la télévision (!) et ne cracherai pas lors de vos prochaines allocutions ; mais soyez persuadé, monsieur, que votre vision de ce qu'est une république et /ou une démocratique me laisse réellement songeuse (et ne me pousse nullement vers la vaccination -là où des propos explicatifs et discutés auraient peut-être eu une autre résonnance)...
Sur ces mots, en Française lambda (!), je vais faire les courses, tant que ce lieu m'est encore autorisé...
* J'ai hésité avec le traditionnel "monsieur le Président", mais j'ai imaginé la réciproque, et je ne souhaiterais pas que vous m'appeliez "madame l'accompagnatrice d'élèves en situation de handicaps, et enseignante Acado***".
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